Deux médecins, Catherine Hafner et Olivia Braillard, une sociologue, Mélinée Schindler et une graphiste, Julie Schneider, ont mené une étude explorant les besoins d’outils visuels dans la pratique médicale. Il arrive que des posters synthétisant des informations médicales soient présents dans des salles d’attente de soignant·es ou que les médecins ou infirmières réalisent des schémas pour accompagner les explications données aux patient·es. Quels sont les besoins actuels en termes d’outils visuels dans la pratique médicale, et les différents types qui peuvent exister ? Comment faire en sorte qu’ils ne se substituent pas à l’échange soignant-patient, fondamental dans l’exercice du soin ?
Quels outils visuels dans la pratique médicale ?
Les outils visuels peuvent constituer une aide à la communication entre patient·es et soignant·es dans la pratique médicale. Mais ceux-ci ne se réduisent pas à un panel de pictogrammes, souvent fourni par l’industrie pharmaceutique. Des photographies, illustrations, dessins, infographies ou encore croquis sont autant d’aides visuelles utilisées en situation de soin… Catherine Hafner, médecin aux Hôpitaux universitaires de Genève (HUG), s’est rapidement rendu compte que de nombreux outils visuels sont fabriqués par les soignant·es eux-mêmes, “mais ces aides ne sont pas à la hauteur de l’expertise d’un graphiste” précise-t-elle. C’est la raison pour laquelle elle décide de collaborer avec une graphiste, Julie Schneider, diplômée de la Haute École d’art et de Design de Genève. Celles-ci ont tout d’abord l’envie de créer des outils visuels qui pourraient être mis à disposition des soignant·es et des patient·es. “On s’est rapidement aperçu qu’avant de créer des éléments visuels, il fallait essayer de comprendre quels étaient les besoins”précise Julie Schneider. Elles s’associent à Olivia Braillard, médecin au HUG et Mélinée Schindler, sociologue à l’Université de Genève spécialisée dans le domaine du soin, pour mener une étude qualitative auprès de 21 professionnel•les de santé et de 15 patient·es. Leur objectif est d’identifier les différents usages et besoins d’outils visuels dans la pratique médicale ambulatoire.
Privilégier l’interaction à la standardisation
Grâce à cette étude, deux catégories d’outils visuels émergent. Julie Schneider et Catherine Hafner distinguent ainsi les contenus se suffisant à eux-mêmes, que le patient peut lire seul et comprendre par lui-même. Ce sont notamment des posters épinglés aux murs de salles d’attente de soignant·es. Ces visuels ne doivent pas laisser place à la confusion, être élaborés et validés par des professionnel•les médicaux et graphistes. L’esthétique est importante, car elle invite au regard. Une seconde catégorie de visuels est caractérisée par l’étude menée : les visuels dits interactifs. Ceux-ci sont élaborés par le soignant en collaboration avec le patient lors de la consultation ou de la prise en charge. Pour les chercheuses, c’est l’intention du soignant envers son patient qui compte dans le cas de ces visuels : il faut que la création soit adaptée aux besoins et ressources du patient et qu’il y ait un point d’accord. “Un dessin peu esthétique d’un médecin qui a pris le temps de dessiner et d’apporter des explications vaut plus qu’une image standard que le soignant donne au patient sans autre précision, pour que ce dernier en prenne connaissance seul chez lui” affirme Julie Schneider. “D’une part, l’outil visuel universel n’existe pas, d’autre part, il ne faut pas perdre la richesse de l’interaction entre le patient et le soignant, celle-ci est unique” ajoute Catherine Hafner pour qui l’interaction prime la standardisation d’un visuel.
Favoriser l’apprentissage d’un langage visuel dans la sphère médicale
Suite à cette étude, Julie Schneider et Catherine Hafner pensent que la mise en place de bases de visuels au niveau local, comme à l’échelle d’un hôpital, pourrait être pertinente. Elle permettrait de mettre à disposition des soignants des visuels se suffisant à eux-mêmes, aux informations validées, élaborés par des professionnel•ls de santé et des graphistes. Elle serait aussi un outil précieux fournissant des éléments graphiques qui pourraient être utilisés comme premières bases des contenus interactifs élaborés par les soignants avec les patients, en consultation. La réutilisation de mêmes éléments graphiques est en effet fondamentale, car la répétition permet, pour les patient·es, l’apprentissage : celui d’un langage visuel dans la sphère médicale.
Source: https://etapes.com/quels-outils-visuels-dans-la-pratique-medicale/